« Comme un cerf altéré cherche l’eau vive »

Dimanche 4 décembre 2022

Depuis le 24 novembre, un cerf monumental et lumineux a trouvé place dans la cour du presbytère et est visible depuis la rue Saint-Nicolas. Il a été installé dans le cadre des illuminations de Noël portées, cette année, par « Le Voyage à Nantes ».
Un constat s’impose: dans notre monde, par-delà la réalité évidente, tout est symbolique !

Installer un cerf, dans la cour d’un presbytère, avec la flèche de la basilique Saint-Nicolas en arrière-plan, dans le cadre – certes oublié de nos contemporains – des fêtes de l’Incarnation et de leur préparation (temps de l’Avent), et enfin, choisir de l’éclairer en vert et violet nous emporte sans détour dans le registre symbolique.

Car le cerf est symbole fort ! Présent dans l’Ancien Testament, sa soif de la Parole fait du cerf un animal familier du bestiaire biblique avant qu’il ne finisse par être associé au Christ lui-même. Une représentation fertile, source de nombreuses évocations dont des chasses légendaires telles celles de saint Hubert ou de saint Eustache.

Sa fougue, sa vitalité et sa belle prestance constituent ses principaux traits. Le cerf est ainsi l’un des animaux important du bestiaire de l’Ancien Testament. Le psaume 41 est certainement le plus éloquent : « Comme un cerf altéré cherche l’eau vive, ainsi mon âme te cherche toi, mon Dieu ». Cette soif insatiable de la Parole divine et la vitalité qui en découle inspirera le prophète Isaïe en ces termes : « Alors le boiteux bondira comme un cerf, et la bouche du muet criera de joie ; car l’eau jaillira dans le désert, des torrents dans le pays aride ».

C’est justement à partir du psaume 41, v.2 que la tradition a vu dans le cerf, l’âme assoiffée de Dieu. Saint Augustin développe longuement ce symbolisme du cerf qui brame vers les eaux : « Courez aux sources, désirez les sources des eaux ; mais n’y courez pas n’importe comment, n’y courez pas comme n’importe quel animal, courez-y comme le cerf. Que veut dire : comme le cerf ? Qu’il n’y ait aucune lenteur dans votre course; courez sans relâche, désirez cette source sans relâche, car nous trouvons dans le cerf le symbole de la rapidité. ». Le cerf apparaît ainsi comme le symbole du catéchumène qui se prépare au baptême, se désaltérant à la source jaillissante : « qui boira de l’eau que je lui donne n’aura plus jamais soif : l’eau que je lui donnerai deviendra en lui source d’eau jaillissant en vie éternelle » (Jn 4,14).

Et saint Augustin  ajoute « Il est encore une autre chose à remarquer dans le cerf. On dit que les cerfs, lorsqu’ils marchent en troupe, s’entraident pour porter les bois qui chargent leurs têtes. L’un d’eux marche en avant, et celui qui le suit pose sa tête sur lui, et ainsi de suite jusqu’à la fin de la troupe. Mais, lorsque celui qui portait seul en avant le fardeau de son bois se trouve fatigué, il se retire en queue de la troupe, pour qu’un autre lui succède et reprenne sa charge, tandis que pour lui, posant à son tour la tête sur un autre, comme les autres le faisaient, il se repose de sa fatigue. C’est ainsi que, portant tour à tour ce qui pèse pour chacun d’eux, ils accomplissent leur voyage et ne s’abandonnent jamais les uns les autres. N’est-ce pas à de tels cerfs que s’adresse l’Apôtre lorsqu’il dit : « Portez mutuellement vos fardeaux et vous accomplirez la loi du Christ » (Ga 6,2). »

Le cerf est aussi un symbole de fécondité et de résurrection (ses bois repoussent chaque année), une image du baptême (il s’abreuve à la Source vive). Les Pères de l’Eglise et les théologiens médiévaux en font un animal pur et vertueux, un attribut du Christ au même titre que l’agneau. Ainsi le cerf prend une nouvelle place symbolique, il représente le Christ, celui qui montre le chemin et qui conduit les belles âmes vers les sommets de la sainteté.

Magnifique invitation à nous préparer, en ce temps de l’avent, à la venue de notre Seigneur !

P. Loïc Le Huen, curé +