Brèches
Dimanche 15 avril 2018

Les personnes ayant récemment longé le mur de l’ancienne Maison d’arrêt (proche du boulevard Guist’hau) ont sans doute eu l’impression d’un grand vide… Celle-ci vient d’être totalement rasée par les bulldozers. D’ici quelques mois, un projet immobilier ambitieux, « Révélations », sortira de terre.

Une maquette de ce projet laisse entrevoir la véritable métamorphose de ce pâté de maisons… : la Maison d’arrêt était entourée d’une immense muraille, infranchissable, sans ouverture. Les futurs logements seront séparés par des chemins piétonniers pour permettre aux passants de traverser le quartier de part en part et faire circuler la vie. La Maison d’arrêt était un lieu totalement minéral, gris et bétonné. La végétation débordera des terrasses et un jardin trouvera place au centre. La Maison d’arrêt était marquée par la fragilité humaine – elle y enfermait ceux qui avaient chuté. Le nouveau projet n’oublie pas la fragilité en réservant quelques logements à des personnes fragilisées par un handicap.

Il y a là une belle parabole de la vie chrétienne ! Nos existences sont parfois marquées par des paroles ou des actes manqués – des faillites en nos existences, parfois invisibles aux yeux du monde et que nous avons entourés de hautes murailles. Ces paroles et ces actes ne concernent pas forcément la justice des hommes, mais Dieu connaît le fond de nos cœurs.

Dans le film « La prière » sorti juste avant Pâques, le héros, Thomas, ancien toxicomane est un jour interrogé par la religieuse fondatrice de la maison où il se trouve pour sortir de la drogue. « Es-tu heureux ? » lui demande-telle. Thomas acquiesce mais elle le gifle : sa réponse n’est pas honnête. Bien sûr, Thomas a fait un long chemin depuis son arrivée, mais il ne compte que sur lui-même. Il n’a pas fait le pas le plus essentiel : se laisser aimer par Dieu. Secoué, il s’effondre dans ses bras et se laisse enfin toucher. Mère Myriam a ouvert une brèche par laquelle la vie divine a pu se glisser.

Le Ressuscité veut donner la vie à nos cœurs affectés. Il veut s’infiltrer pour distiller sa miséricorde et redonner douceur et chaleur à ce qui est dur et froid. N’ayons crainte de le laisser s’introduire dans les brèches de nos murailles intérieures… : « heureux les fêlés, ils laisseront passer la lumière ! ».

Sébastien de Groulard, curé+